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16 décembre 1999

ÉPARGNE SALARIALE ET RETRAITES : UNE SOLUTION MUTUALISTE
Le point de vue de la CFE-CGC
Colloque
J’ai promis d’être brève, je vais essayer de l’être. J’ai, depuis le début des débats, une petite difficulté de sémantique.

Solange Morgenstern, Secrétaire Nationale, CFE-CGC

L’intitulé de ce conclave est : "L’épargne salariale et retraite" : une solution mutualiste, et le thème pour les partenaires sociaux : le point de vue des syndicats : " qui doit gérer et pour quel objectif ? "

Or , on a parlé de beaucoup de choses mais pas tout à fait de cela. C’était très intéressant mais, sur le plan sémantique, quand on dit "épargne salariale" c’est une chose quand on dit "épargne retraite" pour moi cela ne veut rien dire. Il faut quand même être très clair sur ce qu’on veut exprimer quand on parle de retraite.

Il y a dans ce mot une connotation, une recherche de sécurité et une recherche de revenus à un moment donné de son existence. Malgré tous les efforts que font les professionnels pour expliquer ce à quoi on aura droit, les gens ne le ressentent pas clairement. Il faut absolument leur donner cela sous forme d’expression par rapport au salaire. C’est pour cette raison que tout le monde considère que c’est un salaire différé. On a envie de savoir combien on va perdre par rapport à son salaire actuel : 20 %, 25 %, 10 % ? Or, ce qui pouvait être vrai dans le passé parce que les salaires étaient normalement croissants n’a plus de sens aujourd’hui. Les salaires, malheureusement, sont loin d’être restés en position croissante. Au contraire, on passe par des phases peut-être un peu hautes par moment mais on sait très bien qu’à la fin de sa carrière aujourd’hui le revenu baisse assez sensiblement avant la mise à la retraite.

Quand on parle retraite on essaie de parler sécurité de ressources après la période d’activité

Quand on parle d’épargne on évoque des économies. Je regrette d’insister : une épargne c’est une épargne de précaution, de sécurité temporaire. On est parfois même prêt à risquer son épargne. Vous avez des gens qui, parce qu’ils ont un petit peu d’argent, sont prêts à investir, à prendre des risques : et cela c’est un choix personnel, un choix individuel mais ça n’est pas des revenus de retraite. Si vous demandez aux gens s’ils ont envie de jouer leur retraite en bourse, je suis sûre que tout le monde vous dira non, quelles que soient les catégories socio-professionnelles que vous abordez.

Les mots sont donc très importants. Il s’agit soit de l’épargne, soit de la retraite. Les mots aussi ont une importance quand on parle de répartition et de capitalisation. On leur a donné une connotation très spéciale : qui dit répartition dit solidarité. Pourquoi solidarité ? Parce qu’on l’a mise en place pour tout le monde et c’est là que je rejoins ce que disait Jean-Christophe Le Duigou. C’est à partir du moment où l’on est dans un régime obligatoire que l’on a créé une solidarité dans un système. Ceci est très important en terme de sécurité. On revient au thème précédent : la sécurité, c’est ce qu’on recherche en matière de retraite.

Quand on parle de capitalisation, c’est plus une notion d’individualisation, d’individualisme même que l’on évoque. Or, dans les régimes collectifs de capitalisation qui existent, il y en a qui permettent de placer l’argent et de le répartir ensuite sur tous ceux qui ont cotisé dans le régime. Cela existe et, contrairement à ce que disait tout à l’heure un de ces Messieurs, la retraite par capitalisation collective est assez développée, dans les compagnies d’assurance bien sûr, voire même dans certaines mutuelles, mais elle est très développée que ce soit sous forme individuelle ou sous forme collective, les régimes de retraite par capitalisation sont en France une réalité.

Les mots ont donc un sens et nous devons bien préciser les choses. Il s’agit d’un salaire différé. Les gens recherchent des revenus au moment où ils arrêteront de travailler. Aujourd’hui ils ont cette double crainte, ils cherchent des revenus pour quand ils seront sans emploi mais pas encore en âge de bénéficier de la retraite. Également des revenus pour quand ils seront à la retraite. Il est vrai que ça n’est plus un risque, c’est une certitude. C’est ce qu’en assurance l’on appelle les "risques certains". Chacun a aujourd’hui, malheureusement, la quasi certitude de passer par le chômage et de passer par la retraite ensuite. Donc, nous savons très bien qu’il y aura des périodes tout à fait décalées par rapport à ce qui existait dans le passé.

Je voudrais aussi dire, une fois les mots un peu précisés, qu’il faut cesser de mélanger les idées en parlant d’épargne, de retraite collective de répartition etc... On contribuerait ainsi beaucoup à faire comprendre au pays ce qui est la gageure de demain. Je suis d’accord sur ce qui a été dit, il faut que nous préparions "demain". Que voulons-nous pour demain ? Quel niveau de remplacement souhaitons-nous donner à nos anciens par rapport à ce qu’ils avaient dans le passé ? C’est important, car si nous continuons à dire, comme certains, que la retraite diminue chaque trimestre, je m’élève en faux ! La retraite ne diminue pas chaque trimestre.

Contrairement à Jean-Christophe Le Duigou, je dis que la retraite n’est pas un problème démographique, c’est un problème économique. Il faut intégrer la démographie, certes. C’est le problème d’un nombre d’actifs par rapport à un nombre d’inactifs. Si nous avons plus d’actifs au travail il est évident que nous pourrons contribuer à subvenir aux inactifs. Quand je dis inactif, je désigne les retraités, les chômeurs, les enfants, tous ceux qui sont inactifs dans une société. C’est donc plus le problème économique de la distribution de ce que les actifs produisent pour les inactifs qu’un problème démographique.

Il est évident que si un pays a besoin d’actifs demain, on retrouvera les bonnes vieilles recettes d’immigration pour avoir suffisamment d’actifs. Ce sont ces actifs-là qui contribueront aux ressources des inactifs à condition de trouver un emploi. Que la retraite ait été calculée en capitalisation ou en répartition le problème sera le même, parce que ce qu’on distribuera c’est bien ce que le pays produira. On peut en débattre à perte de vue, mais c’est bien comme cela que se pose le problème.

Je connais bien ce sujet car nous avons travaillé au sein de la CFE-CGC sur ce qui s’est passé dans certains pays et, en particulier, au Québec, concernant la prise en main par les salariés de leur avenir. En effet, à partir du moment où l’on perd trop d’emplois, les partenaires commencent à se poser des questions pour savoir comment en recréer. Les placements que les salariés ont fait de leur épargne dans des fonds éthiques correspondent à des entreprises qui ne détruisent pas d’emplois. On cherche alors à faire des placements à très long terme. Ce n’est pas à vous que j’apprendrai la difficulté qu’il y a d’être certain que les entreprises en question se maintiendront des décennies. Les entreprises d’aujourd’hui ont bien du mal à durer 20 ou 30 ans. Même des grandes entreprises qui avaient vocation à être centenaires ont disparu. C’est pourquoi il faut qu’il y ait un contrôle permanent. Il faut regarder cela de très prêt et ne pas chercher le profit immédiat au risque de ne pas avoir une certaine pérennité.

En ce qui nous concerne et pour répondre à la question qui nous était posée, c’est-à-dire "le point de vue des syndicats sur qui doit gérer et pour quels objectifs ? ", nous disons que ce sont les syndicats qui doivent gérer la retraite de manière si possible paritaire. Dans tous les cas, nous défendrons la retraite d’entreprise sous forme de régimes obligatoires. Tout ce qui est facultatif doit être du niveau de l’individu et non pas de la société. S’il y a des catégories professionnelles qui peuvent faire davantage (il y a toujours les cigales et les fourmis), cela relève du domaine individuel.

Si nous devons créer un troisième niveau de retraite, cela signifie qu’il s’inscrit dans un cadre obligatoire. A partir du moment où cela relève de l’individu, c’est un autre critère et on rentre là dans la notion d’épargne salariale. Or, normalement, l’épargne salariale n’est faite que pour les grandes entreprises. Dans les petites entreprises, on ne connaît pas bien ce sujet. Quand on déclare vouloir rentrer dans les PME-PMI pour traiter de ce problème d’épargne salariale, on parle d’une porte que l’on veut ouvrir. Il y a beaucoup de bonne volonté, mais comment faire à partir du moment où ces entreprises ne donnent pas souvent des salaires permettant d’épargner ? Je veux bien qu’on épargne et qu’on se constitue une retraite complémentaire sur des salaires de 6.000 F, mais je ne pense pas qu’on trouve beaucoup de candidats. Or, il est évident que c’est la situation dans les PME-PMI. Lorsqu’on parle de stock-options dans les PME-PMI, je me demande si elles auront réellement les moyens de les mettre en place. Quelques start-up sans doute, sur le modèle américain, mais pour les autres entreprises on peut en douter.

Pour ce qui nous concerne, nous prendrons toutes nos responsabilités. Nous souhaitons intervenir dans la gestion de ce qui se fera au plan collectif obligatoire ou dans le cadre de l’entreprise.

Au plan de l’épargne salariale, ce que nous voulons c’est donner du pouvoir aux salariés qui ont mis leur argent en plus de l’argent que les entreprises ont versé dans des plans d’épargne salariale. Nous voulons avoir le pouvoir de gérer ces fonds mais aussi d’intervenir dans la gestion des entreprises, sinon il s’agira d’un leurre. Les actions, c’est de l’argent que les salariés donnent et placent quelquefois sans comprendre. La représentation individuelle je n’y crois pas dans ce cadre, car on sait très bien ce que pèse un salarié au conseil d’administration d’une entreprise s’il n’a pas derrière lui les troupes qui détiennent véritablement une partie du capital et ont un pouvoir politique fort. C’est juste une gageure d’avoir un salarié au conseil d’administration.

Pour nous, il s’agit de défendre un vrai pouvoir de gestion des régimes que nous avons mis en place, les régimes de répartition, qui sont les seuls régimes qui ne posent aucun problème de probabilité : nous avons répondu à Bruxelles sur ce point récemment.


Voir le plan du colloque.




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