l’Expansion
Besoin d’idées Monsieur le Premier Ministre

23 novembre 2000 par Alain Lipietz

Réponses à 5 questions sur le thème " Si vous étiez Jospin…"

 35 heures

" Il ne servirait à rien d’en différer encore l’application aux PME ni de toucher au régime des heures supplémentaires. Le gouvernement a déjà attendu deux ans et n’a rien fait. L’abaissement des cotisations sociales employeurs est suffisant pour compenser le coût des 35 heures dans les petites entreprises. Le vrai problème aujourd’hui, c’est le manque de main d’œuvre qualifiée, en particulier pour les chefs d’entreprises qui ont attendu trop longtemps pour embaucher et se retrouvent le bec dans l’eau. "

" Face à cette pénurie il faut lancer un grand mouvement de formation professionnelle, en particulier en ouvrant des nouveaux centres de formation ".

 Rémunérations fonction publique

" Le problème essentiel dans la fonction publique est de réduire le plus vite possible le temps de travail, surtout pour les postiers et les infirmières, avec les embauches correspondantes. Une fois cela réglé, on pourra poser la question de la hausse des rémunérations, en même temps que pour l’ensemble des salariés du privé. "

 Minima sociaux

" Le niveau actuel du RMI ( 2 552 francs par personne) est indigne. Il faut le porter au moins à 3 000 francs, l’indexer rapidement sur deux tiers du Smic, et en étendre le bénéfice aux jeunes de moins de 25 ans. Dès qu’un jeune sans emploi sort du système des allocations familiales, il doit pouvoir bénéficier du RMI. Sinon, il vit comment ? Il vole ?

" Avoir rendu compatible RMI et revenu d’activité pour un an est une bonne chose, mais il faut aller plus loin pour éviter " la trappe à pauvreté " : en instaurant la " proratisation " du RMI. Une Rmiste qui a retrouvé un travail à mi-temps (et donc reste demie-chômeuse) devrait toucher un demi-Smic et un demi-RMI. "

" Concernant le Smic, le problème urgent est celui du rattrapage du " Smic-35 heures " sur le " Smic 39 heures ". Le coup de pouce de juillet dernier n’a pas été assez fort. Il fallait augmenter en un an le Smic horaire d’environ 10 %. D’autant que la grande majorité des accords qui ont suivi la loi Aubry II a prévu un gel des salaires, alors que l’inflation n’était qu’à 0,8 % : c’était avant le choc pétrolier."

 Les dépenses de santé

" Il n’y a pas de dérapage mais plutôt une remise à niveau. Les pauvres ne se soignaient plus. Grâce à la CMU, ils peuvent à nouveau le faire. Même phénomène pour les jeunes qui ont trouvé un emploi : la première chose qu’ils font, c’est d’aller chez le dentiste. De ce point de vue, l’accélération des dépenses est une bonne chose. Au delà, il n’y a aucune autre économie à espérer que dans la prévention : d’où l’importance centrale de l’Ecologie Humaine. "

 Entretenir la croissance

" il faut continuer d’entretenir la croissance par la demande : la hausse du salaire horaire et les investissements environnementaux. Le problème de l’offre de travail est réel. La politique de flexibilité a été désastreuse : en brisant l’accumulation des savoir-faire (comme on le voit dans le bâtiment). Pour éviter que lors de l’inévitable retournement de conjoncture du capital humain ne soit à nouveau perdu, il faut absolument poursuivre la réduction du temps de travail afin de laisser le moins possible de gens sur le bord du chemin. Et on revient à la nécessité d’une politique volontariste de formation professionnelle afin d’en finir avec le problème du travail non qualifié ".



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