Poster un message
En réponse à :La campagne se tend
jeudi 26 mai 2005
Je n’ai plus du tout le temps de m’occuper de ce blog ! Je me contente, au fur et à mesure, de rédiger des pages sur les points intéressants dans le débat : sur le rapport entre la Constitution et la régulation du capitalisme, sur la Constitution et le modèle allemand et bien sûr l’exercice de (…)
En réponse à :
> La campagne se tend
Cher Alain,
Toujours éclairant de lire tes témoignages ou analyses.
Il me semble cependant que ton engagement raisonné pour le TCE et lucide sur les rapports de forces européens te conduisent peut-être à omettre quelque chose : en France, pour commencer, il faut bien reconnaître que les partisans du "NON de gauche" ont su mener une véritable campagne de masse (avec des techniques d’agitation politique que n’auraient pas renié Lénine :smiley-wink) en s’appuyant sur des liens tissés entre de multiples réseaux et militants et que celle-ci a embrayé sur les angoisses de nombreux français (en somme, les délocalisations, en tant que symboles de l’insécurité sociale ont joué le même rôle ici que l’insécurité dans la campagne de 2002). Cependant si cette dynamique a été aussi forte, c’est que le "peuple de gauche" cherche confusément (sans doute) les voies d’une sortie de la crise politique qui a commencé avec l’arrivée au pouvoir de la gauche dans les années 1980 (voir l’audace ou l’enlisement :smiley-wink) et sa conversion au social réalisme (de plus en plus teinté de social libéralisme en raison de la dynamique historique de recomposition du capitalisme) et qui l’a conduite de renoncement en renoncement (dans son incapacité aussi à penser réellement la combinaison de la crise sociale et écologique) à la défaite du 21 avril 2002 (et en Allemagne à celle de dimanche dernier).
Tu as sans doute raison d’être pessimiste sur les rapports de forces capables au niveau européen d’inverser à court (et même peut être à moyen) terme la tendance à la décomposition du modèle social européen hérité du fordisme et dont tu sais si bien rendre compte dans tes analyses. Mais ce faisant dans ta volonté de sauver ce qui peut l’être n’es-tu pas conduit à sous-estimer à la fois la profondeur de la crise de la social-démocratie dès lors que sont en jeux les options fondamentales de ce que devrait être un véritable projet social démocrate et écologique européens ? Et la dynamique potentielle de renouvellement politique (certes non dénuée de risques) dont est devenu porteur au fil de la campagne le NON au TCE.
Et pourtant ô comble du paradoxe (mais comme ton article sur l’après 29 mai le suggère) le meilleur scénario serait aujourd’hui que le OUI l’emporte car ce serait un moyen de capitaliser dans le cadre des avancées rendues possibles par le TCE la dynamique politique à gauche (certes non dénuée de relents souverainistes) instaurée par la campagne du NON.
Ce n’est hélas plus le scénario le plus probable. Et il va nous falloir probablement gérer les conséquences de l’éclatement de la "gauche de gouvernement" (non seulement en France mais en Allemagne, voir les projets de Lafontaine), mais il faut bien dire aussi que celle-ci avait peut-être fait son temps et que son éclatement était ainsi devenue inévitable.
Cela est sans doute difficile à entendre quand on s’est coltiné comme tu l’as fait une campagne aussi difficile que celle que tu viens de mener. Mais il me semble que cela découle presque logiquement de ce que tu as écrit toi-même.
Dans tous les cas tu peux être assuré de mon engagement à tes côtés pour poursuivre les combats.
Amitiés
(Bon je ne suis sûr de rien, et à toi de voir si ça mérite d’être publié mais moi ça m’oblige à penser ce que je ressens confusément).